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Faut-il vraiment verrouiller sa voiture ? Retour sur un débat… pas si ancien

Aujourd’hui, verrouiller sa voiture en quittant le véhicule relève d’un réflexe quasi pavlovien. Un geste qui s’effectue sans y penser, parfois même à distance, en appuyant sur un bouton du porte-clés ou via une application connectée. Mais il fut un temps où la question de savoir si l’on devait fermer à clé sa voiture n’allait pas de soi… et où certains s’y opposaient fermement.

Les débuts du verrouillage automobile

Les premiers dispositifs de verrouillage apparaissent au début du XXᵉ siècle, alors que l’automobile commence à se démocratiser aux États-Unis. La crainte d’un « fléau » du vol automobile pousse certains constructeurs et accessoiristes à proposer des systèmes pour sécuriser le volant, la colonne de direction ou le capot moteur.

En 1921, la presse britannique alerte déjà sur la hausse des vols de voitures et incite les conducteurs à adopter un système de verrouillage. Trois ans plus tard, la revue Autocar loue un « ingénieux » dispositif capable de bloquer simultanément toutes les serrures via câbles et boulons — un luxe technique à l’époque.

Pourtant, à cette époque, fermer sa voiture à clé n’est pas universel. Laisser les portes ouvertes et les vitres baissées est courant, même en centre-ville. On juge l’idée de tout verrouiller comme excessive, presque méfiante vis-à-vis de ses concitoyens.

Une question de « bonne conduite »… au sens littéral

Dans les années 1920, certains milieux considèrent qu’un véhicule stationné doit rester accessible en cas d’urgence. La police de Londres, en 1925, recommande même de laisser les voitures déverrouillées pour pouvoir les déplacer rapidement si besoin.
La crainte est qu’un véhicule fermé gêne la circulation ou bloque un accès, dans une ville où la voiture commence à cohabiter avec les bus et tramways.

À l’inverse, les partisans du verrouillage dénoncent l’augmentation des vols et le laxisme de certains automobilistes qui laissent bagages ou effets personnels à la vue de tous. La presse de l’époque s’étonne que « tant de personnes prennent la peine de fermer leur maison à clé mais laissent leur voiture ouverte ».

Du vol opportuniste au crime organisé

La situation bascule au début des années 1930, avec la montée en puissance de véritables bandes spécialisées dans le vol d’automobiles et le pillage de véhicules stationnés. Le Parlement britannique se saisit du problème en 1932 : on parle alors de « motor bandits », littéralement les bandits de la route.
Le législateur introduit une loi imposant de verrouiller les véhicules stationnés, tout en prévoyant un espace libre devant et derrière chaque voiture pour faciliter les manœuvres.

Mais les habitudes ont la vie dure. En 1938, un journaliste d’Autocar rapporte encore le cas d’un automobiliste qui s’était plaint d’un vol… pour découvrir que l’objet disparu avait été pris dans la voiture voisine par erreur, tant les véhicules de l’époque se ressemblaient.

De la clé à la clé… USB

Un siècle plus tard, verrouiller sa voiture n’est plus seulement une question de sécurité physique, mais aussi de cybersécurité. Les voleurs ne forcent plus les portières : ils captent et reproduisent les signaux des clés sans contact, piratent les systèmes embarqués ou interceptent les flux de données des véhicules connectés.
Le débat a changé de nature : la question n’est plus faut-il fermer sa voiture ?, mais comment s’assurer qu’elle est vraiment fermée et inviolable ?.

Les fabricants rivalisent désormais de technologies : clés chiffrées, géolocalisation permanente, alertes en cas d’ouverture, reconnaissance biométrique. Pourtant, dans certaines zones rurales, il reste encore courant de laisser son véhicule ouvert… presque comme en 1925.

Ce qui paraît aujourd’hui une évidence — verrouiller son véhicule — fut un sujet de débat animé il y a moins d’un siècle. Entre les impératifs de sécurité, les usages sociaux et les évolutions techniques, cette histoire rappelle que l’automobile est aussi le reflet des mentalités d’une époque. Et que dans un futur proche, la clé mécanique pourrait bien disparaître… pour laisser place à une nouvelle génération de « verrous » invisibles.




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