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Denis Le Vot au panthéon, mais hors-jeu chez Renault : une erreur stratégique majeure ?

Il y a des décisions de groupe qui, en dépit de leur rationalité apparente, paraissent absurdes quand on les confronte aux faits. François Provost nommé à la tête de Renault Group en est une. Ce choix illustre une dérive politique au sein de l’organigramme, bien plus qu’une reconnaissance du mérite ou des compétences.

Et pourtant, au moment même où Denis Le Vot entre au Motoring Hall of Fame pour son travail chez Dacia, Renault décide de ne pas le promouvoir. Un symbole fort… et une faute de goût monumentale.

Un capitaine visionnaire pour une marque en mutation

Derrière le succès fulgurant de Dacia, il y a Denis Le Vot. Depuis sa nomination à la tête de la marque en 2021, il a insufflé un esprit neuf, affirmant une identité forte : celle d’un constructeur qui assume de faire plus avec moins. Une idée simple, mais qui demande du courage dans une industrie obsédée par les écrans géants et les fonctions gadgets.

Denis Le Vot a repositionné Dacia sur un créneau outdoor, robuste et malin, avec des produits justes, cohérents, désirables et parfaitement en phase avec les attentes d’une clientèle qui refuse de sacrifier l’essentiel à l’accessoire. Jogger, Sandero, Duster… ces modèles incarnent une forme de rationalité joyeuse qui séduit autant les familles que les jeunes actifs.

Un manager respecté… sauf par les actionnaires ?

Le Vot, c’est aussi un parcours exemplaire. Entré chez Renault en 1990, il a occupé des fonctions clés à l’international, notamment en Europe de l’Est, en Russie, en Eurasie et en Amérique du Nord. Il a dirigé des équipes complexes, dans des environnements mouvants, en livrant des résultats solides. Il connaît le terrain, parle le langage des ingénieurs, comprend les réseaux de distribution et sait construire une vision stratégique viable.

Son « éviction » n’a donc rien à voir avec un manque de résultats ou une mauvaise entente avec les équipes. Elle est, au contraire, symptomatique d’un retour du politique au sein de Renault, où les équilibres internes l’emportent sur la compétence. En choisissant François Provost, le groupe valorise davantage le profil du diplomate maison que celui du bâtisseur industriel. Ce n’est pas un choix neutre.

Une perte pour Dacia, un signal négatif pour Renault

Nommé à ce Hall of Fame, on voit mal Denis Le Vot rester à son poste. Dacia entamera une nouvelle phase cruciale de son développement. L’électrification accélère, les marges se tendent, et la concurrence chinoise bouscule tous les repères. À ce moment précis, perdre un stratège capable de concilier prix bas et valeur ajoutée est plus qu’un risque, c’est un pari hasardeux.

Ce départ donne aussi un signal peu rassurant sur la culture interne du Groupe Renault. Lorsqu’on écarte l’un des dirigeants les plus compétents, célébré à l’international pour sa vision et ses résultats, on fragilise toute l’architecture du leadership.

L’héritage Le Vot : faire simple, et bien

Au-delà de l’épisode interne, Denis Le Vot restera comme l’un des très rares dirigeants européens à avoir compris et anticipé les mutations profondes de la demande automobile. Là où tant de constructeurs ont glissé dans l’excès technologique, il a choisi la voie de la sobriété heureuse. Il a su défendre l’idée que l’intelligence ne se mesure pas au nombre de capteurs, mais à la pertinence d’un produit dans la vie quotidienne.

Sa vision aurait mérité d’être portée au plus haut niveau du groupe. Elle est aujourd’hui honorée par ses pairs à l’international. Ironie ultime, c’est au moment de sa reconnaissance mondiale que Renault choisit de le mettre sur la touche. On ne sait si l’histoire jugera cette décision comme une erreur. Mais les observateurs de l’industrie, eux, n’en doutent pas une seconde.




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