street-mario-kart-tokyo

Quand Mario Kart s’invitait dans les rues de Tokyo : retour sur le phénomène Street Kart

Il y a quelques années, les visiteurs de Tokyo pouvaient vivre un rêve éveillé : sillonner les rues de la capitale japonaise au volant d’un kart, déguisé en Mario, Luigi ou la princesse Peach. Le concept, baptisé Street Kart (anciennement MariCar), a vite attiré les touristes du monde entier en quête d’un moment aussi insolite que spectaculaire. Mais derrière cette virée fun et instagrammable, se cachait une affaire juridique bien plus sérieuse, qui a fini par faire tomber le drapeau noir. Retour sur une aventure urbaine qui a amusé Tokyo… jusqu’à ce que Nintendo s’en mêle.

Du jeu vidéo à la réalité : un business juteux et bien ficelé

Lancé dans les années 2010, le concept était simple : proposer à des visiteurs étrangers (souvent en possession d’un permis international) de louer un kart pour parcourir les rues de Tokyo, Akihabara ou Shibuya, en file indienne encadrée par un guide, le tout en tenue de super-héros ou de personnages bien connus des jeux vidéo.

L’entreprise exploitait habilement l’imaginaire collectif autour de Mario Kart, sans jamais en utiliser officiellement le nom. Les clients recevaient une combinaison, un casque, et un kart à essence — dans un pays pourtant très strict sur la sécurité routière. Le succès fut fulgurant : des dizaines de karts dans les rues, des photos virales sur Instagram, et des vidéos YouTube générant des millions de vues.

Mais Nintendo n’a pas apprécié la blague

L’enthousiasme du public n’a pas duré longtemps du côté de Kyoto. En 2017, Nintendo a décidé d’attaquer l’entreprise exploitante, initialement appelée MariCar (contraction explicite de Mario Kart). Le géant japonais du jeu vidéo accusait la société de violer ses droits de propriété intellectuelle en laissant entendre un lien avec sa célèbre franchise.

Le tribunal de Tokyo a tranché : non seulement l’entreprise devait changer de nom (elle deviendra Street Kart), mais elle devait également cesser toute exploitation de l’image des personnages de Nintendo. Une décision assortie d’une amende de 10 millions de yens (environ 80 000 € à l’époque), confirmée en appel en 2020.

Sécurité, chaos et touristes en liberté

Au-delà de la question juridique, les autorités locales ont fini par s’inquiéter des risques liés à cette activité. Les karts, bas sur la route, circulaient dans un trafic dense, sans protections spécifiques pour les conducteurs. Plusieurs accidents, parfois graves, ont été rapportés. L’absence de ceintures, la conduite en milieu urbain et la surexposition touristique ont fini de ternir le tableau.

Tokyo a donc progressivement renforcé sa réglementation. Les entreprises de karting touristique ont dû ajouter des protections, assurer leurs véhicules et faire signer des décharges plus précises. Mais rien n’y a fait : l’expérience perdait peu à peu son charme et son aura de transgression joyeuse.

Un rêve interdit, mais pas tout à fait mort

En 2021, la pandémie de COVID-19 a porté le coup de grâce à l’activité. Privés de touristes étrangers, les opérateurs ont suspendu leur service, certains définitivement. Aujourd’hui, quelques rares initiatives survivent, souvent plus discrètes, et très encadrées.

Le Tokyo Street Kart reste un souvenir de voyage marquant pour des milliers de personnes, une attraction où la voiture devient accessoire de fiction, et le bitume un prolongement des circuits numériques de notre enfance. C’était aussi, à sa manière, un laboratoire du pouvoir évocateur de l’automobile comme médium culturel.




Il n'y a aucun commentaire

Ajoutez le vôtre